RDC : Encore des instructeurs militaires Belges…Et après… ?
Sur interpellation du sénat congolais, M Denis
Kalume, ministre d’Etat en charge de l’intérieur et de la
décentralisation a été convié, le jeudi 05 juillet dernier, à répondre
à une question orale sur l’insécurité grandissante sur toute l’étendue
de la République.
Evoquant essentiellement l’insécurité à l’Est du pays, il a défendu
l’option qu’il qualifie de politique de sagesse levée par le
gouvernement, laquelle privilégie le dialogue avec les factions armées
et leurs commanditaires contrairement à l’option militaire défendue, à
la fois, par certains milieux diplomatiques, parlementaires congolais
ainsi que la société civile.
L’option du dialogue traduit l’échec du brassage amorcé sous 1+4=0
. Ayant lamentablement échoué dans sa prétendue volonté de doter le
pays d’une armée unifiée, disciplinée, bien équipée, respectueuse des
droits humains…, le gouvernement congolais ne souhaite pas s’aventurer
sur ce terrain boueux, après tous les enlisements de ses forces armées
(FARDC) sur le front Est du pays, ces dernières années.
Craignant un échec inéluctable en optant pour l’option militaire,
le gouvernement congolais estime mettre à profit ce temps pour reformer
son armée et la préparer suffisamment à sa mission de défense de
l’intégrité territoriale. Pour y parvenir, M. Denis Kalume a laissé
entendre que le gouvernement compte accélérer la formation des
militaires congolais par les Belges en ce qui concerne le domaine
militaire, la logistique militaire au moyen de l’équipement des
différentes armes, le versement ininterrompu d’une solde plus
importante que celle dérisoire empochée jusque-là par les FARDC. Ce
retour des instructeurs Belges est programmé pour le 20 août 2007
prochain.
Et au peuple congolais de s’interroger : Encore des instructeurs, des experts militaires Belges… Et après… ?
D’entrer de jeu cette question mérite d’être posée. Il y a quelques
mois sous le règne de la fameuse formule 1+4 =0, une mission militaire
belge avait séjourné en RDC dans le but entre autre d’amener à la
formation d’une seule et unique force armée congolaise à travers le
brassage des puissances de feu de belligérants d’alors.
Ce processus de brassage sensé s’est terminé avant la tenue des
élections est donc resté inachevé à ce jour avec notamment
l’obstination de Laurent Nkunda et ses hommes ainsi que d’autres
groupes armés nationalistes, à réintégrer les FARDC.
Le peuple congolais se souvient aussi de la précipitation avec
laquelle les dernières brigades ont été brassées au point que l’on a
misé sur le quantitatif au détriment du qualitatif. L’armée congolaise
est devenue ce fourre-tout où l’on trouve plus de commerçants que de
vrais militaires, des civils sans formation convertis du jour au
lendemain en militaires, des jeunes socialement en perdition s’y
réfugiant …
Le peuple congolais se rappelle encore que les brigades brassées
soit disant disciplinées se sont distinguées par des exactions
vis-à-vis des populations sensées être sous leur protection, s’érigeant
ainsi en bourreaux de leurs propres frères et sœurs.
Beaucoup d’organisations indépendantes ont confirmé l’indiscipline
de ces brigades et leur propension à des exactions à l’égard des civils
congolais. Dans sa conférence du 1er juillet dernier à l’espace Matonge
à Ixelles, le député national M. KIAKWAMA Kia KIZIKi citant la division
des droits de l’homme de la Monuc a rapporté que, d’après celle-ci, 80%
de crimes commis en RDC étaient l’apanage de la police et de l’armée.
Et les congolais se rappellent que très récemment un journaliste de
Radio Okapi a été abattu par des hommes en uniformes, une journaliste
de la RTNC et son frère ont été victimes d’un attentat perpétré par des
militaires, un autre journaliste d’une radio à Kisangani pour avoir
filmé Joseph Kabila lors des festivités du 30 juin dernier s’est vu
tabassé à mort par la garde prétorienne de ce dernier..
Le peuple congolais a toujours présent à l’esprit le massacre des
adeptes de BDK par la police et l’armée congolaise appuyée par des
éléments de l’armée angolaise. Les rafles de nombreux ressortissant de
l’Equateur et leur mise à mort après les événements du 22-23 mars
dernier ayant abouti l’exil forcé du Sénateur Jean Pierre Bemba. La
tuerie au camp Tshatshi, d’après Me Marie-Thérèse Nlandu de 50
personnes membres de MLC de Jean Pierre Bemba, par le colonel BOFATE
récemment promu à une fonction supérieure. L’emprisonnement d’un nombre
important des femmes proches de Bemba à la prison centrale de Makala,
après arrestations arbitraires opérées par les hommes en uniforme de
Joseph Kabila, selon Me Nlandu.
Les congolais se souviennent que, pour de raison de souveraineté,
le gouvernement de transition 1+4=0 avait souhaité assurer lui-même le
paiement de ses militaires en dépit de la proposition de l’Union
Européenne d’en garantir le versement et le contrôle.
Dans un tel contexte, le grand retour des instructeurs Belges
annoncés au Sénat par le ministre congolais de l’intérieur, serait-il
le remède adéquat ? Au vu du comportement des militaires brassés lors
de la première mission Belge, la grande question que l’on devrait se
poser, ne serait-elle pas celle de savoir : « qu’est-ce qui adviendrait
une fois que cette mission aurait pris fin et serait rentrée en
Belgique ? »
Il est donc impérieux que la Belgique qui voudrait contribuer à la
formation des militaires congolais fasse au préalable une évaluation
sur l’impact de son travail auprès de ces mêmes militaires après la
première phase de formation. Aussi faudrait-il encore évaluer
l’implication personnelle de Joseph Kabila à la matérialisation des
objectifs assignés à cette première phase de formation des militaires
congolais ?
Si les experts militaires Belges s’étaient déjà penchés
objectivement sur cette évaluation, ils se rendraient compte que les
problèmes minant l’armée congolaise ne seraient pas principalement
d’ordre pécuniaire mais plutôt liés à la politisation de l’armée, à la
propension de ses cadres aux affaires très lucratives, à l’impunité de
ses cadres supérieurs impliqués dans des massacres, exactions… et la
promotion de ces derniers à des postes importants. Ils constateraient
que le laisser-faire entretenu par Joseph Kabila en serait également
pour quelque chose. Le chef ne donnant pas d’exemple, quid de la
discipline dans les rangs ?
Comment des militaires brassés lors de la première phase, ne sont
pas capable d’assimiler et d’intégrer le caractère apolitique de
l’armée ? Pourquoi en dépit des heures passées sous encadrement belge,
ces militaires ne comprennent toujours pas qu’ils ne sont pas la
propriété de Joseph Kabila mais plutôt de l’Etat congolais ?
Quelle garantie la Belgique a-t-elle obtenu du gouvernement
congolais et de son chef attestant que cette fois-ci, les hommes en
uniformes assimileraient et intégreraient le caractère apolitique d’une
armée dans une démocratie digne de ce nom ? Que la garde prétorienne de
Joseph kabila « GSSP » deviendrait une garde républicaine et ne
demeurerait pas cette espèce de service de gardiennage privé ?
Si la Belgique devait payer les militaires congolais, serait-elle
en mesure de veiller à ce que la totalité de leur dû leur parvienne
sans être soustrait au passage par un supérieur ? Et comment va-t-elle
s’organiser pour que les militaires affectés dans les provinces, dans
les villages ne subissent pas la loi de 10% càd un retrait de ces
pourcentages de leur solde par un supérieur sans leur consentement ?
Et si l’impunité des politiques, des militaires impliqués dans des
massacres et leurs promotions à un statut important ou des fonctions
supérieures devait se poursuivre, pourquoi alors s’engager à une
formation qui n’aura pas d’ impacts à la promotion de la démocratie et
la prise de conscience par l’armée de sa mission fondamentale de
défense de l’intégrité du territoire et non d’ un seul individu, en
l’occurrence Joseph Kabila ?
A quoi servirait une telle formation, si après , la police et
l’armée continueront à se livrer à des exactions contre de populations
civiles ou à être utilisées pour remplir des sales besognes telles que
les rafles, les éliminations physiques d’opposants, journalistes,
citoyens patriotes… ?
Pourquoi s’engager à payer la solde des militaires congolais
sachant qu’après, avec un budget 2007 très restrictif, l’Etat congolais
ne pourra pas garantir une paie régulière à ses militaires ? Et donc il
y a une forte probabilité que ces militaires replongent davantage dans
les exactions… ?
Le peuple congolais demande au prochain chef du gouvernement Belge,
à son gouvernement, au sénat et au parlement de surseoir à une telle
mission. La Belgique, si elle devait y aller précipitamment, risquerait
de renforcer la politisation de l’armée voulue et entretenue à de fins
personnelles par Joseph Kabila.
Avant toute implication, elle devra exiger de Joseph Kabila et son
gouvernement de faire preuve d’actions concrètes et mesurables allant
dans le sens de la dépolitisation de l’armée , de sa non exploitation à
de fins personnelles ... Aussi devra-t-elle exercer une bonne dose de
pressions sur Kabila pour que soient condamnés des cadres supérieurs de
l’armée impliqués dans le massacre des adeptes de Bundu dia Kongo, des
partisans Jean Pierre bemba, des journalistes et biens d’autre
congolais.
Et si la Belgique s’implique dans une telle mission sans exiger des
préalables mesurables, qu’elle ne s’étonnent pas de l’immobilisme de
l’armée congolaise càd que celle-ci ayant été renforcée renoue avec ses
anciennes méthodes et reste la machine à tuer de Joseph Kabila, que
celle-ci s’adonne aux affaires très lucratives plutôt qu’à la défense
de l’intégrité territoriale, une fois les instructeurs et experts
militaires Belges partis.
A bon entendeur, salut… au carré…
Blaise B. MANTOTO.
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