Le Roi Albert II chez Kabila, bientôt président à vie ?
L’annonce de l’invitation du Roi Albert II au cinquantenaire du Congo-Kinshasa le 30 juin 2010 suscite bien des remous et des interrogations même si le chef de la diplomatie Belge, M. Yves Leterme s’est montré prudent et réservé. Du côté de la diplomatie congolaise, on fait remarquer que le Roi sera le premier sur la liste des invités, une façon de montrer toute l’importance que revêt sa présence en juin prochain à Kinshasa. Une présence symbole du nouveau départ dans les relations entre Kinshasa et Bruxelles, après une période bien terne sous l’ère Karel De Gutch., ancien ministre belge des affaires étrangères.
Mais cet empressement du côté congolais à saisir la moindre occasion propice depuis l’intronisation de Joseph Kabila pour inciter le Roi des belges à fouler le sol congolais, cache bien autre chose. Il s’agit de présenter cette invitation comme un symbole de réconciliation, en ce temps de réchauffement diplomatique. Mais en réalité pour le régime Kabila, la présence d’Albert II sera vécue comme un signe fort de légitimation de son pouvoir.
Récemment Kabila vient de mettre en place une commission d’évaluation constitutionnelle dont la mission non déclarée est d’aboutir à une révision constitutionnelle portant entre autre sur le mandat présidentiel. Il est question in fine de faire passer le mandat présidentiel actuellement de 5 ans renouvelable une fois à 7 ans et le rendre illimité, puis permettre au président de siéger au Conseil Supérieur de la Magistrature. Et pourtant la constitution du 18 février 2006 en vigueur, en son article 220, stipule : « le nombre et la durée des mandats du Président de la République et l’indépendance du pouvoir judiciaire ne peuvent faire l’objet d’aucune révision constitutionnelle »
Au regard des ambitions affichées par Kabila de se tailler une fois de plus, une constitution sur mesure, et par le jeu de la fraude électorale à grande échelle, d’espérer se faire élire à vie, comment le Roi Albert II devrait-il réagir personnellement à cette invitation insidieuse ? Et que pense le gouvernement fédéral belge vis-à-vis d’un président qui bafoue les prescriptions constitutionnelles sur l’indépendance de la justice ?
Dans la réponse à réserver à cette invitation, le Roi Albert II, dans sa sagesse légendaire, devrait se rappeler du rapport de la Fédération Internationale des Droits de l’Homme publié à Bruxelles en juillet 2009 dénonçant la dérive autoritaire du régime Kabila, sa politique systématique de harcèlement des voix dissidentes et son non respect du principe de séparation des pouvoirs. Il devrait donc se rendre compte que ce régime marche sur les traces de celui du feu maréchal Mobutu Sese Seko…Kabila est donc entrain de se métamorphoser en léopard. En ce temps de crise, où l’heure est à la réduction des dépenses, engager des dépenses faramineuses pour célébrer ce cinquantenaire … des dépenses qui serviront de prétexte aux dignitaires du régime pour détourner les deniers publics au détriment du peuple, Le Roi devrait conformément à l’esprit de son discours de fin d’année au peuple Belge, en tirer des leçons et décliner personnellement cette invitation-piège.
L’enthousiasme du ministre Belge de la coopération sur le bénéfice mutuel du réchauffement des relations diplomatiques entre Kinshasa et Bruxelles notamment sur le plan économique, en ce temps de crise ne devrait pas occulter le fait que le bénéfice de la coopération ne profitera pas au peuple congolais. Mais plutôt au système maffieux érigé par Kabila avec le soutien indéfectible de ses mentors rwandais et occidentaux.
Face à un régime qui compte sur la présence du Roi des Belges pour se conforter dans sa « démocratie de la force » ou encore sa tyrannie, son enrichissement personnel au détriment du bien commun, il appartient au gouvernement fédéral Belge par la sagesse de son premier ministre et la lucidité de son chef de la diplomatie de se montrer méfiant à l’égard de cette invitation insidieuse.
Blaise B. Mantoto
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