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UDPS LIEGE
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5 septembre 2015

Opinion personnelle – Kabila, son découpage territorial et le dialogue avec l’UDPS :Mode d’emploi d’un glissement

Opinion personnelle – Kabila, son découpage territorial et le dialogue avec l’UDPS :
Mode d’emploi d’un glissement
Joël Kandolo Owawa

Dans une subtile stratégie de vouloir sans doute se maintenir au pouvoir de manière illégale, en multipliant des stratagèmes irrationnels, le président Kabila et son camp en sont arrivés au découpage territorial. Certes ce découpage a été une volonté du législateur, mais le moment choisi ainsi que la manière dont il est réalisé semblent relever d’une démarche politicienne du régime au pouvoir en RDC.

A première vue, ce démembrement des provinces est considéré et ou utilisé par la majorité pour défaire certains des adversaires potentiels du pouvoir de leur base électorale unifiée! Le seul exemple du découpage de la province du Katanga – fief politique de Moise Katumbi qui n’a jamais caché ses ambitions présidentielles – en dit long sur les réelles motivations de ce découpage.

Cependant, réalisé dans la précipitation et sans doute dans le but de nuire un ou quelques adversaires politiques directs potentiels du président Kabila, ce découpage produit par ricochet certains effets (politiques) pervers dommageables à la majorité au pouvoir. En effet, en essayant de défaire à tout prix ses adversaires potentiels, Kabila semble s’être lui-même tiré une balle dans le pied. Cela risque d’occasionner un effet boomerang qui pourrait profiter de manière implicite à ses adversaires politiques.

Quand on observe sans passion ni émotion ce découpage, on se rend compte que le premier grand perdant (ici on part de l’hypothèse d’un jeu électoral clair et correct) est Kabila lui-même car il perd automatiquement sa base ethno-électorale qui est le grand Katanga qui se trouve morcelé ! Il aura beau vouloir installer ses pions dans ces provincettes issues du Katanga, rien ne dit que ses adversaires n’auront pas calculé le coup également. C’est le cas des anciens gouverneurs PPRD et alliés qui se présentent en tant qu’indépendants pour les nouvelles provinces.

A cela, il faudrait ajouter le risque de prolifération des conflits inter-katangais instrumentalisés soit par lui-même ou par les déçus de la majorité au pouvoir, sans compter les officiers de l’armée et des services de sécurité originaires du Katanga. La tâche s’avère donc encore plus difficile.

D’ailleurs, sans peut être s’en rendre compte, certains ténors du PPRD, qui ont soutenu mordicus ce découpage dans le but de casser les ambitions de certains adversaires potentiels de leur ‘raïs’ doivent se rendre à l’évidence qu’ils ont été également desservis par la même occasion. Prenons le cas d’Evariste Boshab. Vu les postes qu’il occupe au sein de la majorité et étant originaire de l’ancien Kasaï occidental, il paraissait être le seul gros poids lourd en vue dans l’establishment PPRD originaire du Kasaï occidental et il pouvait s’en targuer devant son maitre Kabila. Maintenant que la province a été divisée en deux entités, il ne devrait pouvoir se contenter que de la portion provinciale à laquelle il appartient. Cette situation est presque observable dans toutes les nouvelles provinces où l’on voit l’émergence d’autres tendances qui ne sont pas forcément d’obédience kabiliste.

Cela pourrait faire dire à certains kabilistes aveuglés que ce découpage n’avait aucune visée politicienne ; pourtant, cette mise en place précipitée des nouvelles provinces rentre dans un schéma bien précis de tentative de pérennisation de Kabila au pouvoir. Le découpage était la seconde étape après l’échec de la révision constitutionnelle et la fameuse loi électorale de janvier 2015. Pour preuve, depuis que cette histoire a reçu les foudres de la rue congolaise, on n’entend presque plus parler l’Office national pour l’identification des personnes (l’ONIP) qui est chargé de recensement. Maintenant que le découpage semble poser plus des problèmes qu’être une solution à leur stratégies, ils essayent de passer à la troisième phase qui est celle du dialogue, en essayant d’hameçonner l’UDPS qui, à cause de sa désorganisation et son manque de professionnalisme, avance tête baissée (même au prix de l’éclatement du parti) tel un agneau qu’on conduit vers l’abattoir. Nous y reviendrons!

Quant au non découpage des Kivu, c’est ce que nous avons considéré que Kabila s’est tiré une balle dans le pied car il a démembré les provinces où il pouvait espérer un certain soutien via ses relais du PPRD mais a laissé ( ) intact là où il est le plus contesté actuellement et surtout l’un de ses très sérieux adversaires, en la personne de Kamerhe y est non seulement populaire mais garde intacte sa popularité. Dans un jeu électoral proportionnel, Kabila peut être certain qu’il perdrait les Kivu lamentablement face à Kamerhe et n’ayant plus la mainmise sur le grand Katanga démembré, il peut être sûr de tout simplement perdre les élections. Mais cette question n’est pas et ne devrait pas être à l’ordre du jour car il (Kabila) n’a tout simplement plus le droit de se présenter après les deux mandants légaux qu’il va achever en 2016.

Malgré le découpage territorial actuel, l’UDPS, le parti cher à Etienne Tshisekedi, ne devrait pas vraiment, à mon avis, en souffrir car c’est le seul parti qui est réellement considéré dans toute les provinces comme combattant les dictatures de Mobutu aux Kabila père et fils. Nous l’avons vu lors des élections 2011 ou même dans des provinces supposées fiefs du kabilisme, notamment à l’est et au Katanga, Etienne Tshisekedi est parvenu à drainer d’énormes foules lors de ses multiples meetings. Néanmoins, ce parti souffre des maux presque endémiques qui minent tous ou la majorité des partis politiques congolais depuis l’indépendance ; notamment en ce qui concerne la structuration du parti.

L’UDPS est aujourd’hui identifiée à l’unique personne de Etienne Tshisekedi. L’âge ne lui permettant peut être plus de poursuivre la politique, il pourrait se retirer au profit de son fils Félix Tshilombo Tshisekedi qui peine déjà à fédérer tout le monde non seulement autour de sa personne mais également autour d’un projet réformateur, refondateur et restructurant en vue des grandes échéances à venir. Ce parti pourrait ne pas survivre à l’instar du MNC après Lumumba, du MPR après Mobutu. Il en est de même du PALU qui ne survivrait pas après Gizenga… L’UDPS traverse en plus une crise interne qui pourrait carrément mener à la scission pure et simple du parti et le dialogue proposé par Kabila n’arrange pas les choses, non plus. Nous en avons expérimenté le weekend du 28 août 2015 à Bruxelles avec des accrochages entre les pro et anti dialogue. Facebook devient le terrain de confrontation intra-partisane par excellence des tenants et des adversaires du dialogue avec Kabila, au sein de l’UDPS et au-delà. Et ça vole très bas !

L’idée même d’envisager un dialogue actuellement avec un Kabila dos au mur ne peut que faire révolter certains et faire dire aux détracteurs de l’UDPS qu’ils sont en train de donner de l’oxygène à ce régime asphyxié sur tous les plans. L’opportunité même de ce dialogue pose problème car le seul moment où le dialogue en vue de l’instauration d’un gouvernement d’union nationale et de planification rationnelle des élections de 2016 était en 2011, après les élections chaotiques et tout au plus tard lors des concertations de 2013. Les tricheries massives étaient des raisons valables d’inviter tout le monde autour d’une table afin de réfléchir sur la direction vers laquelle il faudrait mener ce pays. Malheureusement et comme dans ses habitudes, l’UDPS a navigué à contre-courant et a réservé un refus catégorique à toute option de dialogue encouragée même à l’époque par le Centre Carter et la Mission d’observation électorale de l’Union européenne. Si l’UDPS va aujourd’hui au dialogue, elle risque de naviguer dans le vide par la suite et se retrouver isolée dans ce jeu anachronique.

Il faut admettre que si ce parti a survécu aux départs des poids lourds comme les Kibassa Maliba, Birindwa, Lihau, Kyungu, Shabani et bien d’autres autres cadres, c’est parce qu’en face il y avait un certain Etienne Tshisekedi autour de qui les militantes et militants pouvaient se retrouver. Il incarnait à lui seul l’UDPS. Le parti c’est moi, pouvait-il se targuer. La question que les partisans de l’UDPS devraient se poser est : à qui profite ce dialogue ? En effet, qu’est-ce qu’ils gagneraient en allant dialoguer avec Kabila en fin de mandat, alors que la Constitution lui impose dans ses prérogatives quotidiennes (et non seulement dans le cadre d’un dialogue) la mission d’être le garant de la paix, de l’unité et de la cohésion nationales. Quel dividende politique espèrent-ils gagner concrètement dans cette démarche, en apparence incongrue ? Sont-ils convaincus que le même Kabila qui a largué ses anges de la mort en janvier 2015 est-il subitement disposé d’organiser un dialogue, aux frais de l’Etat, pour permettre à l’UDPS d’accéder paisiblement au pouvoir, après lui en avoir barré la route en 2011 ? Si c’est la question de l’audit du fichier électoral, de l’enrôlement des nouveaux électeurs majeurs et de la parité dans la composition de la CENI, faut-il impérativement un dialogue pour amener Kabila à y répondre s’il était réellement de bonne foi ? Pourquoi n’applique-t-il pas d’initiative toutes les recommandations pertinentes émises en son temps par les différentes agences et missions d’observation électorale, s’il est de bonne foi et se soucie réellement de l’avenir apaisé du pays ?

Puisque le dialogue/négociation suppose, par principe, qu’on accepte de faire des concessions de part et d’autre. Quelles seraient les concessions que l’UDPS a prévues de faire face à Kabila ? Quel est point d’inflexion en-deçà duquel le dialogue n’est plus tenable?

D’ailleurs, on sent que la rhétorique change dans le discours de l’UDPS dont la feuille de route reposait sur la stricte application de l’accord cadre et des résolutions des Nations Unies qui exigeaient la tenue d’un dialogue sous la facilitation de la MONUSCO. Or, il semble que ce n’est plus le cas. Derrière l’obsession d’aller au dialogue à tout prix, ne se cache-t-il pas un jeu subtil de partage du pouvoir pour renflouer les caisses de l’UDPS car non prête à affronter financièrement le coût des campagnes électorales à venir ? Puisque l’UDPS trouve une justification ‘divine’ à toutes ses prises de position, il n’est pas exclu que le mobile latent de ce dialogue soit le partage du pouvoir. Et dans l’hypothèse de la réalisation de cette option, il est plus que probable que l’UDPS revienne avec la justification : « Comment voulez-vous vous assurer de la crédibilité du processus électoral sans participer / contrôler/ exercer la gestion des organes organisateurs des élections (CENI, ministère de l’Intérieur ou d’autres ministères régaliens) pour que rien ne nous échappe ? » Et finalement ce sera le but recherché et à atteindre, avec la conséquence de cautionner et de consacrer officiellement le glissement par une transition avec Kabila dont l’UDPS ne maîtrisera certainement pas l’issue, comme en 1992 et en 2003 où elle a fini, à chaque fois, par être dupée et écartée par les jeux politiciens bien élaborés par ses adversaires.

Par ailleurs, rien ne dit que les stratèges de Kabila ne soient pas aux faits de l’état de santé actuel du « lider maximo » et qu’ils n’attendent pas le moment opportun pour assommer le coup fatal à ce parti qui les a tant ennuyés, quitte à les appâter par des postes dans le gouvernement et les anéantir le moment venu soit par des fausses affaires ou autres? Dans l’hypothèse d’une participation de l’UDPS à un quelconque gouvernement national – nous ne sommes pas encore là – quelle sera la marge de manœuvre de ce gouvernement devant rendre des comptes devant un parlement acquis à une très large majorité à la cause de Kabila et qui peut faire tomber ce gouvernement à tout moment?

Si à une certaine époque l’UDPS n’avait a pas besoin d’une communication politique professionnelle pour mobiliser des foules car à la seule évocation du nom de Tshisekedi wa Mulumba, les gens frémissaient hystériquement à l’idée d’aller entendre ce qu’il avait à dire, les temps ont changé. Autres temps autres mœurs dit-on, en l’absence du sphinx de Limete, Félix Tshisekedi ne devrait pas se contenter du seul nom de Tshisekedi qu’il porte pour diriger actuellement le plus grand parti du Congo. A l’instar de Marine Le Pen, il devrait commencer par s’entourer des vrais visionnaires, compétents qui comprennent les enjeux du moment, et laisser de côté la cour des opportunistes diplômés tribalistes et fainéants qui n’apportent aucune valeur ajoutée politique au parti. Et ensemble, ils devraient réfléchir sur comment réformer, restructurer, surtout moderniser ce parti pour optimiser son fonctionnement et professionnaliser sa communication politique. Car actuellement la communication du parti est à la fois chaotique et nébuleuse, pour ne pas dire inexistante. Or au 21ème siècle, la communication politique reste au centre des joutes politiques. Sinon, c’est un nouveau boulevard qu’ils préparent à Kabila au cas où par malheur ce dernier organisait un simulacre d’élections à laquelle il se présenterait malgré tout.

Joël Kandolo Owawa
Ninove / Belgique
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